Depuis l’explosion du streaming, on nous répète que les playlists sont devenues la nouvelle radio. Être placé dans la bonne sélection Spotify, Deezer ou Apple Music serait le Graal absolu pour un artiste indépendant : un tremplin vers la visibilité, la découverte et pourquoi pas la carrière. Les plateformes en font un argument marketing : « Nous aidons les artistes émergents à être entendus. »
Mais derrière ces promesses de découvertes équitables se cache une réalité beaucoup plus sombre. Playlists éditoriales inaccessibles, playlisters privés qui monnayent leur influence, fausses écoutes générées par des bots : le système des playlists ressemble moins à une chance pour tous qu’à une loterie truquée, voire à un business douteux.
Spotify et consorts proposent aux artistes de soumettre leurs titres aux équipes éditoriales via leur interface. En théorie, chaque chanson envoyée a une chance d’être écoutée, puis retenue pour intégrer une playlist officielle. En pratique, les portes restent closes pour la grande majorité des indépendants.
Pourquoi ?
Le mythe de la « chance égale pour tous » est entretenu par les plateformes, mais la réalité est beaucoup plus simple : sans relais professionnel solide, vos chances d’entrer dans une playlist éditoriale sont proches de zéro.
Face à ce verrouillage, un autre marché s’est développé : celui des playlists indépendantes. Des particuliers créent des sélections populaires (quelques milliers à quelques centaines de milliers d’abonnés) et acceptent d’y placer des titres d’artistes… moyennant paiement.
Les tarifs varient :
Mais attention : rien ne garantit que votre chanson restera plus de quelques semaines. Rien ne garantit non plus que les abonnés écouteront réellement votre morceau. Souvent, il s’agit d’un coup d’épée dans l’eau : beaucoup d’argent dépensé pour quelques centaines d’écoutes qui ne se traduiront pas en fans fidèles.
Dans certains cas, cela vire à l’arnaque pure et simple. Des intermédiaires profitent de la détresse des artistes pour vendre des placements illusoires. Vous payez, on ajoute votre titre… puis on le retire au bout de quelques jours, ou pire : la playlist disparaît.
Un autre danger vient des playlists frauduleuses, souvent alimentées par des bots. Ces « playlist farms » font semblant d’avoir des abonnés, mais derrière les écoutes ne sont pas humaines.
Conséquences :
Certaines plateformes ou agences peu scrupuleuses vendent encore ce genre de services sous couvert de « promotion garantie ». En réalité, c’est de la fraude au streaming.
Alors, faut-il abandonner l’idée des playlists ? Pas forcément. Elles peuvent servir de complément dans une stratégie plus large. Mais il faut être lucide :
En résumé, une playlist peut donner un peu d’oxygène, mais elle ne remplace pas le travail de fond : construire une fanbase, créer du lien, multiplier les canaux de diffusion.
Si les playlists ne sont pas la solution miracle, où concentrer son énergie ? Voici quelques pistes plus solides et durables :
Ces alternatives prennent plus de temps et d’effort qu’un simple clic sur « submit », mais elles construisent une base solide et durable.
Le système des playlists est présenté comme un eldorado, mais il ressemble souvent à un mirage. Derrière les promesses de découverte se cachent des portes fermées, des intermédiaires peu scrupuleux et parfois de la fraude pure et simple.
La bonne nouvelle, c’est que les artistes n’ont pas à dépendre de ce système. Les outils existent pour reprendre le pouvoir : créer, partager, rencontrer et fidéliser directement son public. Les playlists peuvent être un petit plus, mais elles ne doivent jamais être le centre d’une stratégie musicale.
Au fond, la vraie découverte ne se fait pas dans une case d’une playlist opaque. Elle naît dans la rencontre entre un artiste et un auditeur, dans une émotion partagée. Et ça, aucune playlist automatisée ne pourra jamais l’acheter.